Sur la croyance au sein du phénomène religieux
vocabulaire du lien entre croyance et preuve, exemple la croyance en dieu
Un act de foi consiste à croire sans preuve. La rationalité épistémique est le fait d'indexer sa croyance sur ce qu'on considère y avoir de preuve. Etc. Bref, pour comprendre le phénomène de croyance, il faut des concepts qui permettent de distinguer croyance et preuve. Une fois cela établi, il est utile de distinguer ce qui peut faire l'objet de preuve de ce qui ne peut pas faire l'objet de preuve. La non-croyance est alors le fait de ne pas former de croyance sur ce qu'on considère ne pas pouvoir faire l'objet de preuve.
Note sur le vocabulaire : L'utilisation qui est faite dans la vidéo des termes "déisme" et "théisme" (pour désigner la croyance en une divinité interventionniste ou non interventionniste respectivement) ne relève pas du vocabulaire classique (ou du moins semble spécifique de mouvements athéistes militants). Plus classiquement en philosophie de la religion, le déisme désigne la croyance qu'il serait possible de conclure rationnellement à l'existence d'une divinité sans qu'il n'y ait de phénomène surnaturel (et donc que cela serait possible pour chacun⋅e) et le théisme désigne la croyance qu'il y aurait eu une (ou des) révélation (phénomène surnaturel permettant de conclure à l'existence d'une divinité, qu'il s'agisse d'un phénomène physique ou d'une expérience subjective).
[ philosophie 🤔 22 min ]
naturalisme
(l'extrait de 33:33 à 37:22)
Le naturalisme est la thèse métaphysique selon laquelle il n'y a qu'un seul type de phénomènes (alors appelés phénomènes naturels et qui constituent la nature) au sens où ils obéissent à un seul type de lois (les lois naturelles) qui sont compatibles entre elles. Noter aussi que le naturalisme ne se prononce que sur la compatibilité des différentes lois entre elles et non pas sur la nature de ces lois. Ainsi, il ne tranche par exemple pas l'opposition entre mécanisme (selon lequel les lois fondamentales régissent des liens de causes à conséquence et rien d'autre) et finalisme (selon lequel certain comportements d'ensemble sont aussi régis par des lois fondamentales). Les thèses anti-naturalistes consistent à concevoir des types distincts de phénomènes, au sens où ils seraient soumis à des types distincts de lois incompatibles entre elles et où ils seraient l'un pour l'autre des régimes d'exception. Cette distinction peut concerner : le corps d'un côté et l'esprit de l'autre (en philosophie de l'esprit, on parle ici de dualisme pour désigner la thèse anti-naturaliste), la matière d'un côté et un principe vital qui imprime sa forme dans la matière de l'autre (cette conception dite vitaliste était la conception en vigueur avant qu'on ait des outils techniques et conceptuels pour envisager une explication naturaliste mécaniste de la morphogenèse et de la croissance des organismes), ou carrément la nature toute entière versus un domaine distinct de la nature, la surnature, dont les thèses naturalistes supposent l'inexistence. On parle de surnaturalisme. Noter que le naturalisme n'est pas le matérialisme. Le matérialisme suppose que tout serait physique, mais pas nécessairement que tous les phénomènes physiques seraient soumis à un même type de lois. Ainsi le matérialisme contient certaines thèses naturalistes, mais pas toutes, ainsi que certaines thèses anti-naturalistes non surnaturalistes, mais pas toutes. Des positions permettant d'exemplifier les distinctions se trouvent en philosophie de l'esprit : le fonctionnalisme (selon lequel aurait des expériences subjectives tout processus physique qui rempli certaines fonctions de traitement de l'information) est un naturalisme (les expériences subjectives seraient alors soumises aux lois naturelles régissant les processus physiques qui les causent) mais n'est pas nécessairement un matérialisme (le fonctionnalisme peut considérer que les expériences subjectives sont des phénomènes causés par la physique mais qui ne sont pas physiques eux-mêmes), l'illusionnisme (selon lequel il n'y aurait rien de particulier dans la conscience par rapport au reste des phénomènes naturels et selon lequel nous ne serions simplement pas en mesure – actuellement – de concevoir cela, à l'image de vitalistes dans l'Antiquité incapable de concevoir l'aspect mécaniste du vivant par manque de certains moyens techniques et de certaines notions comme celles ayant trait à la conception moderne du traitement de l'information) est un naturalisme et un matérialisme. Une conséquence épistémologique de certaines thèses anti-naturalistes, c'est que la connaissance des différents types de phénomènes ne peut pas relever des mêmes types de preuve. Par exemple dans certains contextes religieux, le dogme est justifié par des argumentaires fondés sur les notions de révélation, d'exégèse de texte sacré etc. qui ne sont pas reconnues valides hors de ce contexte. Certains types de phénomènes peuvent même être considérés comme ne pouvant pas faire l'objet de preuve, par exemple : les expériences subjectives d'autrui, dans certaines positions dualistes en philosophie de l'esprit.
[ philosophie 🤔 4 min ]
pensée magique et théorie de la confusion ontologique
Lorsqu'une communication est valorisée positivement (don, remise d'une distinction, dédicace, marque de respect, politesse, hommage, sacrement, conseil délivré solennellement, affirmation d'une appartenance religieuse…) ou négativement (rappel à la loi, mise en garde solennelle – typiquement par une autorité symbolique, par exemple un parent –, amende, insulte…) pour elle-même, c'est-à-dire pour ce qu'elle exprime ou évoque, c'est-à-dire : alors cette communication est symbolique : elle est non seulement porteuse d'un sens (et éventuellement médiée par un support qui, lui, a une valeur par ailleurs) mais elle est aussi porteuse d'une valeur, ce qu'on peut appeler une valeur symbolique. Les connaissances fondamentales consistent à distinguer certaines catégories ontologiques et à leur associer des attributs, par exemple : La pensée magique est un mode de raisonnement (c'est-à-dire une façon de former des déductions et notamment d'établir des liens de causalité) caractérisé par le fait de reconnaître à des éléments d'une catégorie ontologique fondamentale des attributs propres à une autre catégorie. Ainsi des entités physiques peuvent êtres valorisées symboliquement (on tient davantage à un objet si c'est un cadeau, ce n'est plus seulement la communication qui est symboliquement valorisée, c'est l'objet lui-même qui porte cette valeur) ou moralement (être bonnes ou mauvaises, comme des reliques, voire des démons ou des anges), être dotées d'individualité (par exemple un doudou), être dotées d'un sens commun au-delà de leur ressemblance perceptible (essentialisme). Et des contenus mentaux peuvent être considérés comme ayant une influence causale directe sur la matière, comme pouvant se déplacer ou comme étant munis d'une volonté propre. La pensée magique est pratiquée de façon consciente, dans le sens où elle est (au moins partiellement) reconnue comme différente du mode de raisonnement rationnel. Elle permet non seulement d'attribuer du sens mais aussi de l'importance (effet dramatique, valeur symbolique), et ainsi de fournir un sentiment de contrôle ou de sécurité, en particulier dans des contextes incertains ou stressants.
[ psychologie 🎭 19 min ]
croyance en les mythes dans la Grèce antique
À l'époque archaïque de la Grèce antique, les divinités, les héros et les mythes associés sont considérés comme relevant d'un temps révolu, un autre temps surnaturel (au sens de l'épisode précédent), dont les poètes pourrait avoir la connaissance en perpétuant une tradition orale remontant à ce temps des héros. Le temps des héros étant surnaturel, pour que le poète puisse faire le lien entre cette surnature et le temps présent naturel, la poésie perpétuant la tradition orale ferait appel à une inspiration d'ordre surnaturel. L'histoire et la physique émergeant ensuite sont porteuses d'une vison naturaliste du passé : sans remettre en cause l'existence d'une surnature comportant des divinités, elles considèrent que la distinction entre nature et surnature ne se fait pas entre le présent et un passé lointain. Les propos sur le passé tombant alors sous le régime de preuve naturel, cela conduit à critiquer les mythes comme comportant des distorsions. Il faut aussi distinguer le fait que des mythes fassent partie de la culture (et donc qu'on soit amené à les connaître et se les imaginer) et le fait d'y croire. Par exemple, à l'époque hellénistique de la Grèce antique, la transmission des mythes est institutionnalisée dans l'enseignement, sans pour autant qu'il s'agisse d'enseigner un dogme destiné à être cru. Dans le même ordre d'idée : la disparition d'une religion ne passe pas nécessairement par une remise en cause de son dogme.
[ histoire 🕰️ 8 min]
Et si on pouvait croire en dieu sans même s'en rendre compte…
[ sociologie 🏙️ 14 min ]
spiritualité et individuo-globalisme
La spiritualité désigne toute conception qui prend comme présupposé (plus ou moins implicitement) : Malgré la sécularisation (recul des institutions religieuses), la spiritualité n'a pas du tout disparu. Dans les multiples nouveaux mouvements, et dans une certaine mesure dans les adaptations des religions traditionnelles face aux nouvelles attentes, la spiritualité s'articule désormais autour des pôles suivants : gnose (croyance d'avoir une connaissance intuitive de la surnature, intuitive au sens où cela s'apparente à une révélation). Noter que l'inspiration du poète grec antique dont on a discuté dans l'épisode 3 relevait de la gnose. Ces principes sous-tendent une façon de penser – nommée individuo-globalisme – qui dépasse le cadre de la spiritualité (commerce, alimentation, entreprise…). L'individuo-globalisme intègre des éléments de la modernité (individualisme et mondialisation) tout en la contestant. Un discours contestataire dominant donc…
[ sociologie 🏙️ 18 min ]
religion dans l'écoféminisme états-unien de la seconde moitié du XXème siècle partie 1 et partie 2
On qualifie d'écoféminisme tout féminisme qui entend dresser un parallèle entre : qui soit : Un reclaim est une démarche de réhabilitation (c'est-à-dire remise au goût du jour et valorisation) et de réappropriation d'un élément culturel. Un culte est une pratique visant à honorer une entité ou un phénomène (que l'on présume exister), pouvant être naturel ou surnaturel. Le religieux désigne l'ensemble des phénomènes relevant du culte ou entourant des cultes. Ce qui fait l'objet de culte est dit sacré. Une religion est une institution religieuse. Le culte repose sur des éléments symboliques (c'est-à-dire qui ne sont pas tant présents, ni pour leur éventuel sens en eux-mêmes, ni pour leur éventuel d'effet, – et ne sont même pas forcément censés en avoir – mais seulement pour leur valeur via ce qu'ils évoquent). Certaines courants de l'écoféminisme ont cherché à exploiter les ressors des phénomènes religieux (ressors symboliques, psychologiques, sociaux…) pour créer du collectif, soutenir les activités militantes (lien social, dialogue…) et surtout développer des imaginaires et des symboliques compatibles avec les causes défendues, au détriment des imaginaires et des symboliques entretenus par les religions en place et jugés comme incompatibles avec les causes défendues. Il s'agit d'un reclaim religieux écoféministe. Ce reclaim s'appuie notamment sur le néo-paganisme. C'est une religion de l'immanence (c'est-à-dire ne reconnaissant aucune surnature) et plus précisément un panthéisme (c'est-à-dire qui considère chaque élément de la nature et la nature toute entière comme sacrés). Il ne présuppose donc a priori aucune distinction de type anti-naturaliste, et est donc a priori compatible avec le naturalisme. Dans la même optique, puisque le néo-paganisme écoféministe ne reconnaît l'existence d'aucune surnature, il n'est pas compatible avec la spiritualité telle qu'on l'a définie dans l'épisode précédent. Cependant, il effectue un reclaim spirituel en mimant des éléments de la spiritualité. Par exemple, là où dans les croyances spirituelles la magie consiste en un pouvoir surnaturel de l'esprit sur la nature, le néo-paganisme écoféministe se réapproprie cette notion et la détourne pour la définir comme l'action de la volonté sur l'état du monde, non pas via des pouvoirs surnaturels, mais via la mobilisation collective. De cet emploi du mot magie découle que ses pratiquantes se nomment sorcières. Autre exemple éventuel, la pratique de la poésie, non pas pour transmettre une révélation surnaturelle (un des usages religieux classiques de la poésie), mais pour développer des imaginaires et des symboliques compatibles avec les causes soutenues (c'est un reclaim). Finalement, le néo-paganisme écoféministe suit une structure proche de l'individuo-globalisme : gnose (via un reclaim) : il ne s'agit une fois encore pas littéralement d'obtenir une connaissance de la surnature par révélation surnaturelle, mais d'obtenir une connaissance de la nature par le lien de soi-même avec la matérialité (plutôt que par la mise à distance ; plus de détail sur ce point dans la partie 2).
Note sur le vocabulaire : Les notions de sacré et de surnaturel sont classiques en anthropologie des religions. Lorsqu'il s'agit de caractériser ce que sont les religions, elles sont cependant en concurrence entre elles et avec d'autres notions comme celle d'esprit (entité personnalisée, symboliquement ou non). Loin de viser à rendre compte de ces débats que d'ailleurs je ne connais pas, les définitions proposées ici (et plus généralement, les textes accompagnateurs) visent simplement à permettre le dialogue entre les épisodes le temps de la promenade, en cohérence avec les pages Wikipédia correspondantes.
[ philosophie 🤔 22 + 21 = 43 min ]
Fin !